31/12/14 Bem vindo do Brasil ! (7300km)
Voilà seulement un peu plus de dix jours que nous avons amarré au continent et nous nous sentons déjà presque chez nous !
L’arrivée à Fortaleza est un peu brutale. En trois semaines de mer, nous passons des petits villages de la Casamance à la 5ème métropole brésilienne de plus de 2,5 millions d’habitants. Après une journée passée à squatter l’internet de l’hôtel 5 étoiles à côté duquel est stationné le bateau, nous remontons les vélos et nous découvrons une ville bien différente de celle que l’on nous avait décrite à l’hôtel !
A l’hôtel, tout le monde défend aux touristes de sortir à pied. Comme nous le fait remarquer Celso, président de Ciclovida, groupe de cycliste de Fortaleza les gérants de l’hôtel sont de célèbres mafieux qui ont passé un bon moment en prison et continuent à s’enrichir grâce aux riches touristes; ils sont mal placés pour nous dire que la ville est dangereuse !
Fortaleza |
Daniel notre hôte de Warm shower nous montre la ville à vélo, ses plages de sable fin en plein centre ville, ses statues de la déesse de la mer Iracema et ses nombreux immeubles que nous apercevions à notre arrivée. Un plaisir de pédaler de nouveau bien que nous comme les vélos avons un peu souffert du mois de bateau : les chaines sont rouillées malgré les 3 épaisseurs de plastique et nous sommes obligées de changer les freins de Maylis qui se sont complètement grippés. Quant à nos jambes, elles ont bien fondu depuis le Sénégal !
Avec Daniel, sa femme et son ami |
Nous restons une semaine chez Daniel où nous sommes accueillies comme des reines. Nous dormons dans des hamacs comme la plupart des habitants du Nordeste (région du nord est du Brésil). La femme de Daniel cuisine très bien mais nous sommes surprises de voir que la famille ne mange pas ensemble. Chacun se sert quand il a faim. choisissant haricots rouges, riz ou spaghettis, plats typiques d’ici.
A Fortaleza, il nous faut aussi faire nos papiers d’entrée au Brésil parce que contrairement aux voyageurs atterrisant en avion, on ne nous a rien demandé, c’est à nous de faire les démarches nécessaires !
Une belle allergie emmène Maylis à l’hôpital. L’occasion de se rendre compte de l’efficacité du système de santé brésilien. Sortie en une heure et demie, rien à payer, même pas besoin de montrer la carte d’identité (juste besoin de donner le prénom de la mère, petit clin d’oeuil avec l’autre côté où l’on nous demande seulement le prénom du père) !
Après avoir passé Noël en famille, nous profitons de notre dernière journée à Fortaleza pour réaliser notre première projection au Brésil avec l’association Ciclovida. La projection est organisée sur une place publique. Malgré le bruit et la lumière, nous avons tout de même une trentaine de spectateurs pour la quasi intégralité cyclistes. Juste après la séance, nous partons pédaler à leurs côtés pour la masse critique mensuelle. Balade nocturne à travers la ville.
Première projection au Brésil |
LE vélo brésilien |
Daniel nous accompagne avec un ami pour sortir de la ville après de durs adieux auprès de la famille qui nous aurait bien adoptées ! Au début, nous avons un peu du mal à nous décider sur le chemin à prendre dans un pays aussi grand. D’autant que le réseau routier est très peu dense. En gros, nous avons le choix entre route rouge nationale très fréquentée et route blanche en terre. L’option route jaune se réduit à quelques tronçons. Nous nous décidons finalement à faire route vers Salvador de Bahia, 1300km plus au sud.
Francisca |
Dès le premier jour de vélo nous nous faisons inviter en famille. Les Brésiliens sont hyper hyper accueillants et chaleureux. Quand nous ne sommes pas invitées, on ne manque pas de nous offrir mangues mutantes, bananes, melons, coca cola ou bien encore de l’apadura, espèce de nougat solide à base de sucre de canne.
Nous passons la première nuit chez Francisca qui nous invite à la messe. Tout le monde chante et applaudit. Nous repartons le matin après avoir bu le café et mangé du Tapioca (crêpe à base de farine de manioc) que notre amie avait préparé depuis 4h du matin. Elle nous charge également les sacoches de 5 mangues, 4 bananes et le reste de Tapioca !
La côte est assez humide et propice à la culture de nombreux fruits. En fait, nous retrouvons un peu le même climat qu’au Sénégal avec les saisons inversées. Nous ramassons les mangues au bord de la route et les noix de cajou sont mûres (mais très très dures à ouvrir…). Les jours qui suivent, nous quittons la côte et le climat devient vite plus sec.
Clovis |
Après de nombreuses montées et descentes, nous passons la soirée chez Clovis, un sécuritas retraité revenu au village de son enfance. Il vit seul, tous ses enfants travaillant à Fortaleza. Le soir, nous montrons le cin’énergie et organisons une petite projection avec les voisin, enfin…. Avec ceux qui ne sont pas en train de chanter à l’église protestante d’à côté ! En effet, la communauté protestante est très présente et tous les soirs nous nous endormons bercées par leurs chants (pas toujours très justes…). Le matin, nous repartons avec des messages de Jésus dans la sacoche avant !
Nous quittons la BR116 qui traverse l’intégralité du pays pour nous perdre dans des petites routes. Là encore, nous sommes touchées par la sympathies des Brésiliens toujours prêts à s’arrêter discuter. On nous pose de nouvelles questions comme "est ce que nous sommes en train de réaliser une promesse faite à la vierge ?" Ou encore "pourquoi est ce qu’on ne fait pas payer l’entrée du cinéma ??"
Ajoutez une légende |
Spontanément, nous sommes invitées dans une fazenda, grande ferme locale. Là encore, la vierge est omni-présente. Nous discutons avec les 4 générations de la famille et passons la nuit dans les hamacs (la maison était prévue pour accrocher au moins 100 hamacs !) décidément bien confortables.
Ce midi, alors que nous nous arrêtons pour faire une petite pause, un homme approche et nous demande “vous avez mangé ?” nous répondons par la négative et sommes automatiquement invitées à manger dans la famille. Les enfants nous posent mille et une questions et on nous propose de rester le soir et de passer le réveillon avec eux. Encore une bonne occasion pour organiser une projection et aller voir les feux d’artifices avec eux ce soir… mais arriverons nous un jour en Argentine ??
Enfin, pour l'instant nous vous souhaitons à tous une très bonne nouvelle année !
14/01/15 Le Nordeste ou la descente vers le sud en montant (8100km)
Nous passons le réveillon dans le petit village d'Ema où nous avons été invitées en famille. A 18h, nous organisons une projection dans la rue. Grand succès ! Petits et grands apprécient beaucoup les photos du voyage et les enfants font la queue pour pédaler. Le film d'animation brésilien "L'enfant et le monde" que nous avions prévu de projeter fait moins de fans. Peut être un peu trop "lent" à démarrer. Nous ne pouvons néanmoins que le conseiller.
Tous les membres de la famille passent ensuite 2 bonnes heures à se maquiller et à s'habiller et ... finissent par partir sans nous à la ville pour voir les feux d'artifice. Incompréhension totale. La grand mère restée là nous regarde : "mais vous ne pensiez tout de même pas y aller comme ça ?" Alors que nous étions déjà vêtues de nos plus beaux habits, tout le monde a pensé que nous n'étions pas intéressées. La mamie rappelle son fils pour qu'il vienne nous chercher, "mettez au moins du parfum !" En vain. Tout de même, en arrivant sur la place du village, c'est vrai qu'on fait un peu tâche... Tout le monde s'est rassemblé pour regarder les feux d'artifice. Nous rentrons pas trop tard et terminons la nuit bercées par nos hamacs.
Le matin, nous reprenons la route en toute tranquillité, pas grand monde le 1er janvier. Magnifiques paysages comme si nous étions sur un plateau d'altitude assez sec. Lucia s'imagine que nous sommes déjà dans les montagnes de Tucuman.
La route se transforme en chemin. Nous alternons pierres et sable. Notre moyenne plonge dangereusement en dessous des 10 km/h.
Antimoustique bio |
Le lendemain, passage obligé chez nos amis pour le petit dèj, d'autant qu'elle vient de prendre un jour de congé pour pouvoir nous voir partir ! Drôle de moment, mais une chose est sûre, au Brésil tu es cycliste ou tu ne l'es pas !
Sur certains tronçons, la route est malheureusement plus grosse que l'on ne le pensait. Parfois nous sommes obligées de nous jeter dans le fossé au dernier moment sous le klaxon furieux d'un camionneur. Une chose est sûre, il ne freinera pas- Les croix s'alignent au bord de la route, un vrai cimetière.
Dans la journée, un journaliste nous accoste et prend plein de photos de nos têtes fatiguées. Le lendemain, nous sommes dans le journal local.
Depuis que nous sommes parties de Fortaleza, les montées et descentes n'arrêtent pas et nous nous demandons un peu quand cela va s'arrêter. Bien souvent, nous roulons 5h par jour pour faire 50km. Et pourtant, selon nos hôtes, c'est plat ! Cette réponse "vous verrez, c'est plat" nous énerve un peu à postériori, mais on se demande quand même ce que c'est que la montée au Brésil... jusqu'au jour où l'on nous prévient "vous verrez, par ici, ça monte...". On se dit, bon, on passe déjà notre temps à monter, ça ne peut pas être bien pire... mais si !
Le plat |
La montée |
Francisca et son mari |
Heureusement, les familles brésiliennes qui nous accueillent presque tous les soirs nous aident à garder le sourire. Nous pouvons citer la famille de Francisca chez qui nous nous arrêtons une journée. Francisca est une grand mère très attachante vivant avec son mari dans une grande fazenda (ferme), ils y élèvent poules et vaches dont on boit le lait tous les matins (10 litres par vache et par jour !) Pour les fêtes, leurs enfants sont venus de Brasilia avec leur famille. Projection improvisée le soir. Les brésiliens sont tellement curieux !
Yolanda et son mari |
Nous pouvons également parler de la famille qui le lendemain, nous a gentiment prêté sa maison en construction. ou encore de la famille de Raimundo vivant encore une fois dans une fazenda. Leur fils est fan de l'équipe de foot argentine. De nouveau, nous projetons des photos du voyage avec le cin'énergie ainsi que notre vidéo de présentation du projet traduite en portugais. Les réactions sont très emphatiques, surtout quand nous montrons des photos de vaches et de moutons français à des fermiers ! Le soir, nous sommes la plupart du temps invitées à manger les incontournables haricots rouges, riz et spaghettis à volonté.
Dans la famille de Raimundo |
Une journée, en fin d'après midi, alors que nous sortons de 15km de piste (3h de galère), nous sommes intriguées par un énorme drapeau des Etats-Unis qui trône dans le jardin d'une fazenda. Nous décidons de tenter notre chance en demandant à camper. "Pas besoin de tente, il pleut, vous dormirez à l'intérieur". Nous faisons la connaissance de Nena qui après avoir vécu aux Etats-Unis, est rentrée au pays et vit désormais dans la campagne profonde de l'état du Pernambuco avec son 3ème mari, un petit jeunot fort sympathique. Tout cela pour s'occuper de sa mère qui a 91 ans, ou plutôt qui a 86 ans depuis 6 ans à en croire ce qu'elle dit ! Un attachant petit bout de mamie qui passe son temps à chanter dans sa tête en se rappelant du temps où elle dansait encore. Dans la maison sont également de passage Ethel, la nièce une jolie Brésilienne bien habillée et bien maquillée qui nous raconte avec passion ses stages de médecine sur un bateau dans l'amazonie bolivienne ; sans oublier Cobi, le petit fils américain de 7ans. Un vrai blondinet aux yeux bleu venu passer ses vacances chez la grand mère pour apprendre le portugais. Nous passons une super soirée avec cette joyeuse troupe atypique. Au matin, les adieux sont déchirants avec la mamie qui apparemment s'est bien attachée à Maylis !
Dans la fazenda américaine |
Et puis les options de petites routes se font plus rares et nous sommes obligées de nous orienter vers les nationales. En regardant la carte, jusqu'à Salvador, nous n'avons pas bien le choix, ce sera route nationale. Reste à savoir si nous prenons la BR-110 ou la BR-116, un peu plus à l'ouest. Étant donné que Lucia refuse catégoriquement de faire un kilomètre de piste de plus, nous optons pour la BR-116. Nous sommes obligées de prendre une autre route nationale pour y accéder.
Les fazenda se font plus rares, pourtant, tous les champs sont grillagés ce qui rend difficile le camping sauvage. Un soir, coincées par la nuit qui tombe à 18h, nous trouvons refuge dans une station service. Le gardien de nuit nous installe dans "le salon des camionneurs". Nous sommes réveillées par la télévision brésilienne qui annonce un attentat à Paris. A moitié endormies, nous ne comprenons pas grand chose, on en saura plus demain.
A 6h, nous sommes de nouveau sur le vélo en route vers Salgueiro, la grosse ville du coin. On se demande un peu si on a fait le bon choix d'itinéraire : toute la zone est reconnue pour ses braquages fréquents : plus d'un par semaine. Étant donné que nous sommes le 8 janvier et qu'il n'y en a pas eu depuis décembre, on flippe un peu ! D'autant que les cibles préférées des braqueurs sont les motards, les bus et les camions blindés de banque. A vélo nous sommes donc encore plus faciles à arrêter !
Mais bon, selon la télévision brésilienne, ici n'est pas pire que Paris ! Les images de l'attentat sont diffusées en boucle.
Le matin, petit tour vers la gare routière pour voir si on ne peut pas s'avancer un peu. Échec, presque tous les bus vont vers la capitale de l'état, Recife. Nous repartons donc à vélo pas très rassurées.
Guerra (Guerre), La paix sur la route. |
Pour ne pas choquer les âmes sensibles, nous ne publierons aucune photo de cet épisode.
60km plus loin. la bande est toujours identique et nos fesses décidément bien crispées.
Nous décidons de tenter du stop pour sortir de cette mauvaise passe. Par chance, notre ennemi de la route numéro 1 nous sauve.
Nous embarquons dans le premier camion, avec Varrey et sa femme Bell l'accompagnant pendant ses vacances. Les deux ramènent le camion vide des légumes de Minas Gerais déchargés à Fortaleza. Un voyage de retour de 3 jours. En cours de route, Varrey est appelé pour charger des oranges dans l'état du Sergipe, au sud de Recife, nous convenons donc d'un point de chute. Après quelques frayeurs (les camionneurs brésiliens ne sont décidément pas les rois de la prudence), nous déchargeons vélos et bagages.
Grâce à ce petit saut de puce, nous sommes désormais à 3 jours de vélo de Salvador sur une route plus tranquille.
Le paysage, lui, a bien changé. Nous avons quitté les épineux de la BR-116
Foret d'eucalyptus |
Noix de cajou |
Ici aussi, nous sommes invitées en famille. Toujours de bon moments.
A l'approche de Salvador, le paysage se transforme en forêt luxuriante. Une grande partie a été rachetée par Petrobras qui y creuse de nombreux puits de pétrole. Dur dur de trouver à dormir dans la zone et nous sommes obligées de terminer dans une pousada.
Ce matin, alors que nous faisions une pause, un cycliste passe devant nous. On s'étonne, ça fait un moment que l'on n'en voit pas passer. Il revient sur ses pas et s'arrête. Nous faisons la connaissance d'Olivio, un retraité fan de vélo depuis son plus jeune âge. Il nous raconte que tous les week-ends, il part à une heure du matin, fait 200km et revient chez lui sur les coups de minuit ! Il nous invite chez lui et nous le suivons jusqu'à Salvador. Une bonne aubaine, on se demande bien comment on aurait fait pour entrer dans la 3ème plus grande ville brésilienne sans son aide.
Magnifique descente sur la baie de tous les saints. C'est donc avec une chance inouïe que nous logeons donc maintenant chez lui avec la plage comme jardin !
29/01/15 Déjà 6 mois de voyage ! (8800km)
Et voilà déjà 6 mois que nous avons quitté le Bourget du Lac ! Nous avons vu tant de choses en une moitié d'année que nous avons du mal à retranscrire ça par écrit...
Notre jardin de Salvador ! |
Toujours est-il que depuis notre dernier article, nous passons quelques jours chez notre ami Olivio et sa femme Leni. Leni nous fait découvrir la cuisine bahianaise typique et nous allons faire un tour en ville tous les 4.
Olivio et Leni |
Pour rallier le centre ville, nous prenons le train/RER qui longe la plage, vue magnifique sur la baie de tous les saints. Après avoir arpenté les rues commerciales, nous remontons la presqu'île en direction de la vieille ville. Passage obligé dans l'ascenceur qui descend et qui monte vers le centre ville pour 15 centimes. Véritable attraction, il est sur toutes les cartes postales de Salvador !
Salvador est une des plus vielles villes du Brésil, la première église datant de 1505.
Olivio nous site le dicton qui dit qu'à Salvador où que tu lèves les yeux, tu vois une église; après vérification, la ville en compte quelques 165 !
Capitale de la province de Bahia, Salvador a également été capitale du Brésil jusqu'au 19ème siècle avant de laisser la place à Rio puis Brasilia.
Dans le centre ville, des femmes habillées en habits traditionnels vendent des aracajés, la spécialité locale : un beignet salé fait à partir de farine de haricot servi avec des crevettes.
La place historique est également animée par de jeunes danseurs de Capoeira, ce mélange de danse et de combat originaire du Nordeste.
presqu'île de Salvador |
Le lendemain, nous retournons en ville à vélo. Après avoir failli nous faire écraser plusieurs fois, nous tombons sur une fête immense dans la ville entière. Olivio nous avait prévenu qu'ici, toute occasion est bonne pour faire la fête, mais nous ne nous attendions tout de même pas à ça ! 5km bouchés par une foule compacte de Brésiliens habillés pour la plupart en blanc suivant un camion bardé d'enceintes propulsant de la musique à fond.
Jeunes, vieux, femmes et hommes, tout le monde danse une bière à la main (ou bien une dans chaque !). Leur consommation est impressionnante. Et quand ça entre d'un côté, ça sort de l'autre ! La ville se transforme en véritable pissotière, les hommes contre les murs, les femmes entre les voitures. Nous nous retrouvons un peu perdues avec nos vélos au milieu de ce capharnaüm...
Accrochage du dit lacet |
Olivio nous explique ensuite qu'il s'agit de la fête de Nosso Senhor do Bonfim. Une procession à travers toute la ville en direction de l'église du même nom où chacun va accrocher un petit lacet de couleur (on n'a pas été vérifier que tous allaient bien à l'église !)
Le dernier soir, nous organisons une petite projection sur la plage avec les voisins. Nous passons de longs moments à discuter avec nos hôtes. Olivio ayant été camionneur, il nous fait voir le problème de l'autre côté : les camionneurs brésiliens sont payés au kilomètre et les distances étant tellement grandes au Brésil, ils n'hésitent souvent pas trop à appuyer sur le champignon pour rentrer plus tôt à la maison ! Il nous explique qu'il conduisait parfois jusqu'à 2000km sans s'arrêter !
Au matin Olivio nous accompagne au ferry qui nous emmènera de l'autre côté de la baie des saints. Encore un immense merci à Olivio et Leni pour ces 3 jours fantastiques.
Adam et Eve version brésilienne ! |
De l'autre côté de la baie, ce sont 500km de cocotiers et de sable fin qui nous attendent... Enfin c'est ce que nous pensions ! Chaque bout de côte à son nom. Nous traversons donc la côte du "Dendé", un palmier dont les bahianais tirent la célèbre huile de Dendé dont tout le monde se sert pour la cuisine, en particulier pour frire les acarajés.
Première baignade dans une eau limpide avec vue sur Salvador... et puis le relief fait des siennes et nous nous éloignons de la mer. Montées et descentes interminables dans une forêt tropicale.
Nous demandons parfois à dormir dans des jardins mais ce n'est pas toujours facile. L'autre alternative sont les hôtels à 10 euros la nuit où nous sommes bien souvent obligées de planter la tente à l'intérieur pour ne pas nous faire dévorer par les moustiques !
Nous qui pensions passer une semaine relax, nous suons dans des montées à 18% pendant 300km sans trop voir la mer.
Lucia et son cacao |
Après la côte du Dendé vient la côte du... cacao ! Elle porte bien son nom, les plantations de cacao fleurissent de toutes parts. Lucia a même l'ambition de faire son propre chocolat. Elle ramasse donc une fève de trois bons kilos, se la trimbale pendant 2 jours et quand elle se décide à l'ouvrir... c'est la déception totale ! Les fèves ne doivent pas être mûres. La conclusion c'est que les inventeurs du chocolat avaient de l'espoir et de la perspicacité !
Chemin faisant plusieurs personnes s'arrêtent en voiture pour nous poser des questions. Nous ne sommes plus les stars du siècle comme en sortant de Fortaleza, mais quand même ! S'arrête entre autre un producteur de cinéma français en plein tournage à Itacaré, LA ville touristique du coin. Nous y passons le lendemain : plages bourrées de monde et moustiques partout. Nous cherchons tout de même l'équipe du tournage. Pas trop difficile à trouver, mais notre ami étant absent, nous continuons notre chemin sans trop de regrets.
Ultime descente avant le plat ! |
Plus que 40km de montées descentes et nous savourons enfin nos premiers jours de plat sur le continent ! Un pur plaisir, au programme quelques heures de vélo puis baignade sur des plages quasi désertes.
The forêt vierge |
Nous passons une soirée en compagnie d'une famille de deux pasteurs évangélistes originaire du Mato Grosso (à quelques 2500km de là) venus passer une semaine à la mer. Le soir ils nous quittent pour aller au "culte" et le lendemain avant de partir, nous formons tous un grand cercle en nous donnant la main en priant à voix haute pour que notre voyage se passe bien. Que l'on y croit ou pas, quand un pasteur te met la main sur la tête en priant Dieu qu'il ne t'arrive aucun malheur, c'est puissant ! Ironie du sort, 2km après, la roue avant de Maylis crève pour la première fois du voyage...
Nous traversons la ville d'Ilheus, lieu de naissance du célèbre écrivain Jorge Amado mais impossible de trouver une librairie (nous sommes encore en recherche depuis avoir quitté Fortaleza), décidément ces Brésiliens préfèrent les séries télé aux bouquins...
En arrivant à Una, il est temps pour Maylis de s'éclipser pour aller faire des courses surprises, et oui, nous sommes le 23 janvier, jour des 25 ans de Lucia ! Nous pédalons 15km de plus et quittons la route principale en recherche d'une plage à côté du petit village de Comandatuba. Nous passons à côté d'un aéroport, bizarre bizarre... Nous apprenons que derrière le village se trouve un méga hôtel resort 5 étoiles caché sur une île déserte où les super stars qui ne veulent pas être vues viennent passer leurs vacances. Quel cadeau idéal pour Lucia ! Nous traversons pour aller sur l'île mais le bateau nous emmène bien loin de l'hôtel sur une magnifique plage de cocotiers.
Le soir c'est repas de fête : Lucia fait une pâte de tacos que l'on cuit sur notre poêle au réchaud et Maylis concocte une méga salade de fruits tropicaux et recompose le gâteau d'anniversaire légèrement écrasé. Le tout accompagné d'une bière presque fraîche, nous nous couchons avec le bide prêt à exploser !
Le lendemain, nous pédalons les derniers kilomètres qui nous séparent de Canaveiras qui sonne la fin de la route. Nous entrons dans une véritable capitale du vélo, il y en a partout. Tout le monde pédale, un bon 50% de part modale, de quoi faire rêver le père Mercat ! Vélo basique, la plupart une seule vitesse, bien assez pour faire les courses, trimballer les enfants, aller à la plage ou au bar !
Deux vélos empilés dans une pirogue |
Stationnement vélo |
Belmonte c'est aussi le début de la côte de la découverte puisque c'est ici que les premiers navires portugais sont arrivés au début du 16ème siècle.
Nous y restons une journée pour dire au revoir à la mer et nous reposer un peu.
crabe en grand |
crabe en petit |
Papaye ou... papaye ! |
La route n'étant pas continue sur la côte, nous prenons vers l'ouest en direction de l'état de Minas Gerais. Nous profitons du plat pour faire notre plus grosse journée au Brésil, 115km ! Nous passons à travers des plantations énormes de papaye, de noix de coco et autres sur plusieurs kilomètres. Tout est fait en grand ici ! Et puis nous retrouvons nos forêts d'eucalyptus. Petit passage en face de LA grosse usine de fabrication de papier. Nos amis de Nébéday ne seraient pas très contents parce qu'ici, la gestion durable de la forêt ça n'est pas leur fort : ils coupent tout, replantent, traitent et en 2 ans le bois repousse... Des hectares de forêt en mono culture mais aussi plein de camions sur les routes... vive le recto verso !
feu forêt d'eucalyptus... |
Notre passage intrigue... |
Ici ce n'est pas si facile de trouver à planter. Les fazenda (fermes) sont immenses et la plupart du temps les propriétaires partent en vacances en laissant les clés à leurs employés. Une fois, on nous répond même "camper c'est interdit par ici, on l'a vu à la télé !"
Apprenti cow-boy |
Nous campons donc le plus souvent sur les berges du fleuve Jequitinhonha que l'on remonte depuis quelques jours en direction de la ville du même nom.
Mort de Maylis et de son vélo ! |
La route est en pointillés, parfois chemin, parfois goudron. Étonnant pour une route reliant des villes de plusieurs milliers d'habitants. Maylis en profite pour être malade pendant deux jours d'affilé. Après avoir vomi l'intégralité de son dernier repas, elle tente le "vélo sans manger", une journée de 45km et elle se ravise bien vite !
Et nous voilà chez Macia et sa petite famille au bord du fleuve. Leur jardin est incroyable, il compte plus de 30 espèces de fruits ! Ils nous en font l'inventaire mais nous n'en connaissons pas la moitié. 5 espèces de manguiers, il va falloir faire attention où on met la tente histoire de ne pas s'en prendre une sur la tête pendant la nuit !
En route ver Minas Gerais et ses montagnes tordues |
PS2 : pour ceux qui souhaitent voir la carte du parcours en précision, cliquez sur l'onglet "où sommes nous", le zoom est assez précis...
Après avoir récupéré une bonne quantité de mangues, avocats, grenades dans le jardin de Macia, nous reprenons notre route en remontant notre ami le fleuve Jequitinhonha. Les journées sont horriblement chaudes et nous faisons plusieurs fois l'erreur de nous laisser tenter par 2,5 litres de Coca ou autre qui, bus en 15minutes top chrono, nous laissent le bide en vrac pendant un bon moment...
La recherche d'un endroit pour dormir doit commencer tôt parce qu'ici comme dans la plupart des régions du Brésil, tout est barbelé, c'est le paradis de la propriété privée. On a beau nous expliquer que c'est parce que toutes les terres ont été vendues à bas prix afin de peupler l'intérieur du pays, ça ne nous facilite pas la tâche. Etape 1 : trouver l'unique fazenda qui possède les 10km de champs, étape 2 : demander si l'on peut camper. La réponse la plus courante est : désolés mais les proprios ne sont pas là, nous ne sommes que les employés. En effet, la plupart du temps les personnes qui vivent en campagne ne sont pas les propriétaires des terres, ces derniers, habitant bien souvent en ville. Maria Angela qui nous accueillera à Belo Horizonte nous racontera même que la fazenda de ses parents étant tellement grande, de toute sa vie elle n'aura jamais été jusqu'au bout de la propriété !
Il nous arrive quand même de demander à planter dans des fazendas et de tomber directement sur les propriétaires. Nous plantons dans la cour et participons à la vie familiale pendant une soirée. Parfois, c'est également l'occasion de faire une projection même si nos hôtes, après une bonne journée à cheval, n'ont pas toujours une grande motivation pour pédaler !
Un soir, alors que nous galérons depuis bien deux heures pour trouver un petit coin pour planter notre tente, nous finissons par bifurquer dans une fazenda à la nuit tombante. Une fois de plus, seuls les employés vivent ici mais nous sommes tellement fatiguées que nous leur demandons directement s'ils peuvent appeler le proprio. Positif, nous nous installons au milieu d'un champ de vaches (mauvaise stratégie : les vaches n'ont pas un sommeil très profond et passeront la nuit à converser à côté de la tente !). Nous sommes invitées à dîner en famille : riz, viande et les célèbres haricots (dits de Minas Gerais mais en fait toutes les régions en font leur spécialité...). Nous montrons ensuite des photos de France et d'Argentine à Maria et ses deux filles alors qu'Antonio, le mari, est parti pour rentrer les vaches, il ne sera pas de retour avant 22h. Le matin quand nous nous réveillons, Antonio est déjà parti traire, 600 litres de lait l'attendent ce qui l'occupe de 3h à 9h du matin. Nous avons juste le temps de le croiser alors que nous partons.
Une fois par semaine environ, nous nous payons le luxe de dormir dans un petit hôtel pour nous reposer et prendre le temps de skyper les parents. Mais depuis le Maroc, nous avons pris l'habitude de négocier les prix. Au Brésil, notre prix de référence est 30 Réals pour les deux (10 euros). A Virgem da Lapa, endroit où nous quittons notre cher Jequitinhonha, nous passons la nuit dans l'auberge de Maria. L'auberge est située juste à côté d'une "église évangéliste". Rien à voir avec une église comme on l'entend en France. Sur la porte, l'indication "salon de beauté pour elle et lui" a eu du mal à être effacé, sur le pas de la porte, le pasteur attend les fidèles qui, bien habillés, viendront s'asseoir sur les rangées de chaises en plastique et chanter en chœur toute la soirée. Après le culte, Maria qui doit avoir un peu pitié de nous, nous demande si on a mangé quelques chose. Le matin, elle nous invite à prendre le petit dèj (on commence un peu à regretter d'avoir négocié les prix...) et au moment de partir elle ne veut plus rien nous faire payer du tout, "c'est Dieu qui me récompensera"...
Nous retrouvons la piste pour une quarantaine de kilomètres. 10km de montée dans un mélange de sable et de pierres. Heureusement il n'y a pas trop de trafic, juste les camions d'eucalyptus pour nous tenir compagnie. Plusieurs fois dans la journée, nous sommes obligées de marcher en poussant les vélos impossibles à diriger dans le sable. Mais arrivées en haut, la vue vaut le coup ! Nous campons sur la place du village après avoir été prendre une douche chez une voisine.
Les jours suivants, nous pédalons sur la crête au milieu des forêts d'eucalyptus avec comme seul point de repère les stations service étant donné que nous ne croiserons aucun village pendant près de 160km. Nous mangeons dans les stations service, nous dormons dans les stations service, nous nous abritons de la pluie dans les stations service qui deviennent notre 2ème maison.
Après 18km de montée sous une pluie battante, trempées jusqu'aux os, le panneau Diamantina 5km nous démoralise : nous qui pensions être arrivées ! Nous débarquons grelotantes dans l'hôpital où des gendarmes sympas nous prêtent leur ordinateur pour envoyer un message à Rodrigo, notre couch-surfer qui ne répond pas. Tout est bien qui finit bien, nous débarquons dans la "républica" (colocation) de Rodrigo. Le lendemain, malgré la pluie qui n'a pas l'air décidée à s'arrêter, nous allons faire un tour en ville accompagnées de Rodrigo et de l'un de ses colocs comme guides touristiques attitrés. Diamantina, comme son nom le suggère, est très connue pour son activité minière principalement or et diamants.
La ville a tout d'une ville coloniale : maisons blanches avec des bordures de couleurs vives. La ville était autrefois un des plus grands lieux de trafic d'esclaves au Brésil (au même titre que les exploitations de canne à sucre). Travaillant dans les mines ou dans la construction, beaucoup y ont laissé leur peau. Ils ont donné leur nom au chemin en pierre de 25km qui relie Diamantina à une des mines : le chemin des esclaves. Diamantina est également le début de l'estrada réal, la route de l'or qui reliait les plus grandes villes minières à une ville portuaire située dans l'état de Rio d'où les bateaux partaient ensuite en direction du Portugal. La fin de l'esclavage au Brésil ne date que de
1888.
Nous faisons le tour des musées (tous gratuits !) et découvrons les techniques de ramassage de pépites d'or : les chercheurs allaient même jusqu'à détourner des rivières entières pour pouvoir passer leurs lits au peigne fin !
Nous faisons également la connaissance de la maison de Xica da Silva, une esclave noire ayant obtenu sa liberté pour avoir eu la chance d'être l'amante du plus grand commerçant d'or de la région. On raconte des histoires horribles sur cette femme qui est devenue une vraie princesse pourrie gâtée. Elle avait à elle seule une bonne quantité d'esclaves. Son amant lui avait fait construire maisons, églises et cédant à ses caprices, il avait fait creuser un étang pour y construire un bateau où Xica pouvait inviter ses amies pour une séance de navigation !
Malheureusement la pluie ne cesse pas et la ville, construite sur le flanc d'une montagne, devient un véritable réseau de torrents. Nous restons donc à la maison à discuter avec Rodrigo, lui même adepte des voyages à vélo.
Le lendemain, nous préparons toutes les affaires en attendant que la pluie se calme. A 14h, nous finissons par nous décider à partir. Trempées en un quart d'heure, nous regrettons un peu notre choix. Mais on nous avait promis une super descente ! Nous pédalons 10, 20, 30, 40, 50 km et toujours pas l'ombre d'une descente qui se mérite, au lieu de cela, des interminables montées descentes qui nous flinguent les mollets. Le moral baisse mais heureusement la pluie finit par s'arrêter. 3 fois de suite, nous demandons à camper et l'on nous envoie dans le champ du voisin. Super, et on fait comment avec les barbelés ?!
Heureusement, encore une fois, nous sommes sauvées par une famille sympa. Nous passerons donc la soirée avec Marco et Rosangela qui ont quitté la folie de la ville de Rio deux ans auparavant pour venir s'installer en pleine campagne. Ils commencent donc à apprendre à cultiver et à élever vaches et poules, changement de vie radical !
Nous passons la soirée à montrer des photos de voyage. Les deux sont très intéressés et posent plein de questions. "Une fois, on m'a proposé d'aller travailler en France" nous dit Marco " mais qu'est ce que j'aurais été faire en France, bon dieu ! Y'a la télé là bas ?"
En échange de nos photos, Marco nous montre un reportage très intéressant sur la pêche au harpon dans la baie de Rio. A 22h, nous baillons donc devant une série de gros poissons se faisant empaler à 1 mètre de distance, vive l'échange culturel !
Le matin, les deux ne veulent plus nous laisser partir. Ils insistent pour nous montrer leurs vaches en croisant les doigts pour que la pluie vienne. Mais la pluie ne vient pas et il est l'heure pour nous de continuer, de nombreuses montées et descentes nous attendent jusqu'à Curvelo. Une fois arrivées en ville, nous essayons de négocier les prix d'une auberge mais c'est un échec total. Il nous reste peu de temps pour sortir de la ville et trouver un endroit pour dormir. En sortie de ville, nous croisons 3 cyclistes qui essaient de nous convaincre que le meilleur endroit pour camper est la station service du centre ville où travaille l'un d'entre eux. Sans trop avoir le choix, nous finissons par nous laisser tenter et finissons par planter la tente entre deux camions. En partant, les cyclistes nous informent "on vous a payé le resto". Euh, merci !
Au fur et à mesure que nous approchons de Sete Lagoas et Belo Horizonte, le trafic devient de plus en plus dense et la route se transforme en deux fois deux voies où défilent les camions. Heureusement la bande latérale est large. Après une centaine de kilomètres, nous arrivons à Sete Lagoas avec un sérieux mal de crâne. Nous sommes reçues par Laerte et Cristiana de Warm Showers, inscrits depuis 5 ans sur le site mais nous sommes les premières cyclistes à passer ! Les deux sont emballés par notre voyage et notre projet. Maylis parle également du voyage en vélo en famille d'il y a 10 ans. Leurs yeux pétillent et ils vont se coucher avec la conviction d'avoir des enfants pour pouvoir faire des voyages à vélo avec eux !
Encore une journée de vélo pas très palpitante à côté de nos amis camionneurs. Au détour d'un virage, nous apercevons enfin Belo Horizonte, ville immense entourée de collines. Après plusieurs heures d'entrée de ville, nous arrivons chez Maria Angela et Elcio, les parents de Guilherme, un cycliste de Belo Horizonte parti étudier les politiques cyclables européennes à Paris. En guise de bienvenue, Maria Angela descend les escaliers, ouvre grand les bras en criant "Lucia, Maylis, mes filles, bienvenue à la maison !" Nous sommes reçues comme des reines d'autant que toute la famille et tout le groupe cycliste de la ville sont au courant de notre arrivée.
Le lendemain, après un tour en ville, nous répondrons aux questions d'une journaliste de O Tempo, LE grand journal de Minas Gerais qui nous consacre une page entière du journal du dimanche, la classe ! Nous allons également faire un tour au "carnaval à vélo" qu'organise l'asso cycliste. Ce sont environ 400 cyclistes déguisés qui se retrouvent pour défiler dans la ville, impressionnant !
Et puis nous laissons les vélos pour aller faire un tour à Rio de Janeiro en bus. A cause du Carnaval, la ville est sans dessus dessous. Du monde partout, plus ou moins déguisé, à prendre des bières dans la rue en suivant un groupe de musique monté sur un camion. Les transports en commun sont bondés et nous passons des heures à attendre des bus qui ne viennent pas.
Nous retrouvons Agathe, une amie de l'INSA partie pour une année d'échange à Rio et qui n'a pas trop envie de rentrer ! Elle a pourtant un peu de mal à nous faire partager son amour de la ville... Nous qui étions venues pour visiter, nous n'avons pas choisi le bon moment. Nous voulions monter au Christ à pied mais le copain brésilien d'Agathe nous met en garde : "Si vous montez à pied, après deux heures de marche, vous serez obligées de prendre un bus pour redescendre de l'autre côté pour acheter le ticket d'entrée au point de vue. Afin d'empêcher les gens de monter à pied, ils ne vendent les tickets qu'en bas du côté où c'est interdit de monter à pied". Génial !
Tous les musées sont fermés et il est difficile de trouver un endroit pour acheter à manger. Même l'eau est payante et affreusement chère. Tout un commerce fonctionne autour de l'eau, vendeurs d'eau fraîche à tous les 10 mètres. Le seul endroit où l'on peut trouver de l'eau gratuite, c'est dans la chasse d'eau des toilettes du carnaval... Mais comment font ceux qui n'ont pas assez d'argent pour se payer une bouteille de 500ml à 5 réals ??
Et de l'autre côté, ce sont souvent les mêmes vendeurs d'eau qui dorment sur la plage faute d'un autre endroit pour dormir...
Malgré tout, on ne va pas faire les rabat-joie, Rio reste une ville magnifique construite entre des "morros", montagnes qui peuvent atteindre 800 mètres d'altitude. Belle combinaison entre plage et montagne.
Enfin, à côté de cela, nous décidons d'aller vers le Sambodromo, lieu des fameux défilés du carnaval pour voir si l'on peut trouver une entrée pas trop chère. En effet, nous avions prévu d'acheter les entrées sur internet jusqu'au moment où l'on s'est rendu compte que les prix n'étaient pas en réals mais en dollars américains ! Un vrai business, sur internet, les prix les moins chers sont d'environ 80 dollars et les organisateurs sont des filous : tu cliques pour acheter le billet en serrant les fesses et bim, ils te rajoutent une taxe de 41% pour payer sur internet ! Nous avons abandonné à ce stade là en nous disant que nous chercherions sur place.
Et nous avons bien fait ! La ville de Rio a mis en place des "billets populaires" pour permettre aux habitants de Rio d'assister aux défilés, mais les habitants sont des filous aussi : ils préfèrent acheter une centaine de places pour les revendre aux touristes !
Toujours est il que nous avons acheté un billet 10 fois moins cher que sur internet !
Le jour J, nous nous présentons au Sambodromo 3h avant que les défilés commencent pour avoir une bonne place (inutile, tout le monde arrive au dernier moment) et là, il commence à pleuvoir des cordes. Peu après nous, arrive une famille de Russes qui a une tête à avoir payé le billet à 150 dollars (ils tirent une de ces tronches que l'on n'a pas trop de doutes !) En 30 minutes, nous sommes trempées jusqu'aux os et il reste 2h30 à attendre. Vu le prix des billets, ils auraient au moins pu couvrir... Pour rassurer nos Russes, certains payent jusqu'à 500 dollars pour avoir une meilleure place ... et se font tout autant tremper !
Mais le défilé vaut la peine, les costumes sont splendides et les chars magnifiques. Chaque école de samba défile l'une après l'autre sur les 750 mètres du Sambodromo. Chaque école dispose d'une heure et demi pour son défilé. Chacune choisit un thème et une chanson que tout le monde répètera en boucle pendant son passage. Ce sont quelques 40 000 personnes qui défileront devant les 72 500 spectateurs jusqu'à 4h du matin. Nous partirons à 1h30 pour aller nous sécher et terminer la nuit dans la gare routière en attendant le bus qui nous ramènera à Belo Horizonte.
Le soir en rentrant, nous repartons en ville pour une projection du cin'énergie. Le public est peu nombreux (tout le monde étant au carnaval) mais très intéressé.
Nous profitons d'une dernière journée de repos avant de reprendre les vélos direction le Paraguay, si nos parents de Belo Horizonte nous laissent partir !
Comme vous pourrez le voir dans le titre, nous avons quitté notre cher état de Minas Gerais il y a quelques jours, après y avoir pédalé quelques 1500km !
Nos parents de Belo Horizonte nous laissent partir les larmes aux yeux en nous faisant promettre de donner des nouvelles !
Nous reprenons donc notre route vers l'ouest sur la MG 50 que nous suivrons pendant plus de 400km. De belles averses les premiers jours nous obligent à passer la nuit dans un petit hôtel.
Le soir suivant, nous demandons à camper dans une ferme. L'accueil est timide mais quand la pluie se met à tomber à verse, les deux papy et mamie finissent par prendre pitié de nous et nous passons la soirée ensemble à l'intérieur. Nous goûtons et regoûtons au célèbre pao de queijo mineiro. Maria Antonia et José Joaquim nous expliquent que tous les fermiers de la région craignent les voleurs à moto. Avec nos vélos chargés, nous sommes donc suspicieuses...
Cette peur des habitants nous suivra également les prochains soirs et nous devons nous y prendre tôt pour trouver un endroit où camper. Un soir, nous passons même une heure trente avant de trouver une famille sympa dans une fromagerie. Nous rions bien quand ils nous proposent du rock-four !
Mais tout de même, 5 refus d'affilée de fermiers qui nous envoient planter chez le voisin, c'est fatigant... Couplé au mauvais temps, les projections du cin'énergie se font plus rares.
Et puis une fois de plus, Maylis tombe malade : cette fois-ci ce sera 5 jours de fièvre et une angine carabinée. Heureusement que Lucia est là pour assurer, préparer les repas et pousser Maylis à la traine dans les montées...
Sinon, le Brésil reste fidèle à lui même, beaucoup de montées descentes et des conducteurs peu scrupuleux. Le paysage par contre est bien différent du nord de Belo Horizonte : des collines de verts tous différents à perte de vue, le lac artificiel de Furnas et les innombrables cascades. Le tout nous fait un peu penser au pays basque... à la seule exception près qu'au pays basque, les toucans sont rares !
Eh oui, nous en croisons presque tous les jours. Faciles à repérer avec leur vol lourd et leur bec coloré aussi gros que leur corps ! Les toucans vivent généralement en couple mais ne sont pas très photogéniques. Nous essaierons de nous améliorer la prochaine fois pour les photos !
Au 5ème jour de fièvre, Maylis capitule et prie Lucia de faire du camion stop. Ce qui n'est pas une mauvaise idée étant donné que nous sommes attendues dans deux jours par notre association à Sao Paulo. Après avoir passé la journée à essayer de faire du stop à l'ombre de la station service, nous abdiquons et nous dirigeons vers la gare routière.
Arrivée nocturne à Riberao Preto 150km plus loin où nous sommes reçues par Tiago, le meilleur ami d'un contact Warm-showers, en voyage à vélo depuis 3 ans. Tiago travaille également sur un projet de cinéma ambulant au Brésil en camion mais galère un peu à trouver des subventions. Merci la France et ses subventions publiques qui croient dans les projets des jeunes !
Nous passons une journée à Riberao Preto et visitons notre premier Décathlon depuis la France. En passant la porte, nos vieux habits Décathlon nous font prendre de la valeur... eh oui, ici tout est 3 fois plus cher qu'en France !
Nous laissons les vélos quelques jours chez les parents de notre cher Warm-showers et faisons une deuxième tentative de stop jusqu'à Sao Paulo. Les braquages de voiture fréquents rendent les conducteurs un peu méfiants : en 3h de temps, personne ne s'est arrêté et nous terminons une fois de plus dans le bus avec de beaux coups de soleil.
Adriana, la soeur du président de l'association avec qui nous sommes en contact nous invite dans son appartement au centre de Sao Paulo. Sao Paulo est une métropole immense : plus de 16 millions d'habitants, ce qui fait d'elle la plus grande ville d'Amérique du sud... nous ne regrettons pas d'avoir laissé les vélos !
Le premier jour, nous nous baladons dans le centre pour filmer un peu l'ambiance de la ville. Nous sommes impressionnées par la quantité de personnes vivant dans la rue. Comme beaucoup sont droguées, le piéton a parfois du mal à anticiper leurs comportements. Malgré notre attention, Maylis se prend une bonne beigne dans l'oeil alors que Lucia était en train de filmer. Acte gratuit d'une femme de la rue qui passait par là. La police ne bouge pas. Adriana nous expliquera qu'elle a interdiction de toucher aux mendiants. Bon, Lucia, on va ranger la caméra, d'accord ?
Les jours suivants, nous filmons les bénévoles de l'association Sociedade do sol qui travaillent depuis plus de 10 ans à la promotion d'un système de chauffage d'eau solaire très performant et peu onéreux. Une bonne alternative au "pommeau de douche électrique" que l'on voit dans toutes les maisons du sud brésilien, équipement électronique peu cher à l'achat mais qui plombe ensuite les factures des ménages et représente bien souvent 40 à 50% de leurs dépenses d'électricité. Nous avons également la chance de rencontrer des familles qui ont installé le système de chauffage d'eau solaire. Ces dernières vivent dans une conurbation à 50 km de Sao Paulo. Pour nous y rendre, nous alternons marche à pied, métro, bus, taxi, bateau, bus ! 3h30 de transport.
Le retour est encore plus folklorique : il a tellement plu pendant la journée que certaines rues sont inondées par plus de 40cm d'eau qui ont drainé les poubelles du coin. Sao Paulo est vraiment une ville de fous ! Si beaucoup de Brésiliens y viennent travailler ou étudier, nombreux sont ceux qui veulent en partir après quelques années.
Et nous voilà rentrées à Riberao Preto. Nous prendrons le temps de monter le court métrage dès notre arrivée à Tucuman. En attendant, il nous reste quelques 900km au Brésil. Croisez les doigts pour nous qu'ils soient plus plats !
Ça y est, après 2000km de montée et 2000km de descente, nous voilà sorties de ce grand pays qu'est le Brésil ! Mais avant de vous en dire d'avantage, petit retour en arrière à Riberao Preto où nous vous avions laissé la dernière fois.
Nous continuons à travers les champs de canne à sucre de l'état de Sao Paulo, Après plus de 10 000km et quelques 300km de projection, le pneu arrière de Lucia nous quitte et nous sommes obligées de faire du stop jusqu'à la ville suivante pour changer de pneu. Dans l'après midi, nous entrons dans l'état du Parana.
17/02/15 Eucalyptus for ever ! (9700km)
Francisco, fils de Macia |
Après avoir récupéré une bonne quantité de mangues, avocats, grenades dans le jardin de Macia, nous reprenons notre route en remontant notre ami le fleuve Jequitinhonha. Les journées sont horriblement chaudes et nous faisons plusieurs fois l'erreur de nous laisser tenter par 2,5 litres de Coca ou autre qui, bus en 15minutes top chrono, nous laissent le bide en vrac pendant un bon moment...
La recherche d'un endroit pour dormir doit commencer tôt parce qu'ici comme dans la plupart des régions du Brésil, tout est barbelé, c'est le paradis de la propriété privée. On a beau nous expliquer que c'est parce que toutes les terres ont été vendues à bas prix afin de peupler l'intérieur du pays, ça ne nous facilite pas la tâche. Etape 1 : trouver l'unique fazenda qui possède les 10km de champs, étape 2 : demander si l'on peut camper. La réponse la plus courante est : désolés mais les proprios ne sont pas là, nous ne sommes que les employés. En effet, la plupart du temps les personnes qui vivent en campagne ne sont pas les propriétaires des terres, ces derniers, habitant bien souvent en ville. Maria Angela qui nous accueillera à Belo Horizonte nous racontera même que la fazenda de ses parents étant tellement grande, de toute sa vie elle n'aura jamais été jusqu'au bout de la propriété !
Maylis montrant l'album photo |
Il nous arrive quand même de demander à planter dans des fazendas et de tomber directement sur les propriétaires. Nous plantons dans la cour et participons à la vie familiale pendant une soirée. Parfois, c'est également l'occasion de faire une projection même si nos hôtes, après une bonne journée à cheval, n'ont pas toujours une grande motivation pour pédaler !
Antonio |
Un soir, alors que nous galérons depuis bien deux heures pour trouver un petit coin pour planter notre tente, nous finissons par bifurquer dans une fazenda à la nuit tombante. Une fois de plus, seuls les employés vivent ici mais nous sommes tellement fatiguées que nous leur demandons directement s'ils peuvent appeler le proprio. Positif, nous nous installons au milieu d'un champ de vaches (mauvaise stratégie : les vaches n'ont pas un sommeil très profond et passeront la nuit à converser à côté de la tente !). Nous sommes invitées à dîner en famille : riz, viande et les célèbres haricots (dits de Minas Gerais mais en fait toutes les régions en font leur spécialité...). Nous montrons ensuite des photos de France et d'Argentine à Maria et ses deux filles alors qu'Antonio, le mari, est parti pour rentrer les vaches, il ne sera pas de retour avant 22h. Le matin quand nous nous réveillons, Antonio est déjà parti traire, 600 litres de lait l'attendent ce qui l'occupe de 3h à 9h du matin. Nous avons juste le temps de le croiser alors que nous partons.
Avec Maria |
Nous retrouvons la piste pour une quarantaine de kilomètres. 10km de montée dans un mélange de sable et de pierres. Heureusement il n'y a pas trop de trafic, juste les camions d'eucalyptus pour nous tenir compagnie. Plusieurs fois dans la journée, nous sommes obligées de marcher en poussant les vélos impossibles à diriger dans le sable. Mais arrivées en haut, la vue vaut le coup ! Nous campons sur la place du village après avoir été prendre une douche chez une voisine.
Les jours suivants, nous pédalons sur la crête au milieu des forêts d'eucalyptus avec comme seul point de repère les stations service étant donné que nous ne croiserons aucun village pendant près de 160km. Nous mangeons dans les stations service, nous dormons dans les stations service, nous nous abritons de la pluie dans les stations service qui deviennent notre 2ème maison.
Eucalyptus land |
Diamantina |
Après 18km de montée sous une pluie battante, trempées jusqu'aux os, le panneau Diamantina 5km nous démoralise : nous qui pensions être arrivées ! Nous débarquons grelotantes dans l'hôpital où des gendarmes sympas nous prêtent leur ordinateur pour envoyer un message à Rodrigo, notre couch-surfer qui ne répond pas. Tout est bien qui finit bien, nous débarquons dans la "républica" (colocation) de Rodrigo. Le lendemain, malgré la pluie qui n'a pas l'air décidée à s'arrêter, nous allons faire un tour en ville accompagnées de Rodrigo et de l'un de ses colocs comme guides touristiques attitrés. Diamantina, comme son nom le suggère, est très connue pour son activité minière principalement or et diamants.
La ville a tout d'une ville coloniale : maisons blanches avec des bordures de couleurs vives. La ville était autrefois un des plus grands lieux de trafic d'esclaves au Brésil (au même titre que les exploitations de canne à sucre). Travaillant dans les mines ou dans la construction, beaucoup y ont laissé leur peau. Ils ont donné leur nom au chemin en pierre de 25km qui relie Diamantina à une des mines : le chemin des esclaves. Diamantina est également le début de l'estrada réal, la route de l'or qui reliait les plus grandes villes minières à une ville portuaire située dans l'état de Rio d'où les bateaux partaient ensuite en direction du Portugal. La fin de l'esclavage au Brésil ne date que de
1888.
Nous faisons le tour des musées (tous gratuits !) et découvrons les techniques de ramassage de pépites d'or : les chercheurs allaient même jusqu'à détourner des rivières entières pour pouvoir passer leurs lits au peigne fin !
Xica da Silva |
Nous faisons également la connaissance de la maison de Xica da Silva, une esclave noire ayant obtenu sa liberté pour avoir eu la chance d'être l'amante du plus grand commerçant d'or de la région. On raconte des histoires horribles sur cette femme qui est devenue une vraie princesse pourrie gâtée. Elle avait à elle seule une bonne quantité d'esclaves. Son amant lui avait fait construire maisons, églises et cédant à ses caprices, il avait fait creuser un étang pour y construire un bateau où Xica pouvait inviter ses amies pour une séance de navigation !
Malheureusement la pluie ne cesse pas et la ville, construite sur le flanc d'une montagne, devient un véritable réseau de torrents. Nous restons donc à la maison à discuter avec Rodrigo, lui même adepte des voyages à vélo.
Avec Rodrigo et un coloc |
Le lendemain, nous préparons toutes les affaires en attendant que la pluie se calme. A 14h, nous finissons par nous décider à partir. Trempées en un quart d'heure, nous regrettons un peu notre choix. Mais on nous avait promis une super descente ! Nous pédalons 10, 20, 30, 40, 50 km et toujours pas l'ombre d'une descente qui se mérite, au lieu de cela, des interminables montées descentes qui nous flinguent les mollets. Le moral baisse mais heureusement la pluie finit par s'arrêter. 3 fois de suite, nous demandons à camper et l'on nous envoie dans le champ du voisin. Super, et on fait comment avec les barbelés ?!
Marco |
Heureusement, encore une fois, nous sommes sauvées par une famille sympa. Nous passerons donc la soirée avec Marco et Rosangela qui ont quitté la folie de la ville de Rio deux ans auparavant pour venir s'installer en pleine campagne. Ils commencent donc à apprendre à cultiver et à élever vaches et poules, changement de vie radical !
Nous passons la soirée à montrer des photos de voyage. Les deux sont très intéressés et posent plein de questions. "Une fois, on m'a proposé d'aller travailler en France" nous dit Marco " mais qu'est ce que j'aurais été faire en France, bon dieu ! Y'a la télé là bas ?"
En échange de nos photos, Marco nous montre un reportage très intéressant sur la pêche au harpon dans la baie de Rio. A 22h, nous baillons donc devant une série de gros poissons se faisant empaler à 1 mètre de distance, vive l'échange culturel !
Le matin, les deux ne veulent plus nous laisser partir. Ils insistent pour nous montrer leurs vaches en croisant les doigts pour que la pluie vienne. Mais la pluie ne vient pas et il est l'heure pour nous de continuer, de nombreuses montées et descentes nous attendent jusqu'à Curvelo. Une fois arrivées en ville, nous essayons de négocier les prix d'une auberge mais c'est un échec total. Il nous reste peu de temps pour sortir de la ville et trouver un endroit pour dormir. En sortie de ville, nous croisons 3 cyclistes qui essaient de nous convaincre que le meilleur endroit pour camper est la station service du centre ville où travaille l'un d'entre eux. Sans trop avoir le choix, nous finissons par nous laisser tenter et finissons par planter la tente entre deux camions. En partant, les cyclistes nous informent "on vous a payé le resto". Euh, merci !
Avec Laerte et Cristiana |
Arrivée à Belo Horizonte |
Encore une journée de vélo pas très palpitante à côté de nos amis camionneurs. Au détour d'un virage, nous apercevons enfin Belo Horizonte, ville immense entourée de collines. Après plusieurs heures d'entrée de ville, nous arrivons chez Maria Angela et Elcio, les parents de Guilherme, un cycliste de Belo Horizonte parti étudier les politiques cyclables européennes à Paris. En guise de bienvenue, Maria Angela descend les escaliers, ouvre grand les bras en criant "Lucia, Maylis, mes filles, bienvenue à la maison !" Nous sommes reçues comme des reines d'autant que toute la famille et tout le groupe cycliste de la ville sont au courant de notre arrivée.
Carnaval à vélo |
Le lendemain, après un tour en ville, nous répondrons aux questions d'une journaliste de O Tempo, LE grand journal de Minas Gerais qui nous consacre une page entière du journal du dimanche, la classe ! Nous allons également faire un tour au "carnaval à vélo" qu'organise l'asso cycliste. Ce sont environ 400 cyclistes déguisés qui se retrouvent pour défiler dans la ville, impressionnant !
Et puis nous laissons les vélos pour aller faire un tour à Rio de Janeiro en bus. A cause du Carnaval, la ville est sans dessus dessous. Du monde partout, plus ou moins déguisé, à prendre des bières dans la rue en suivant un groupe de musique monté sur un camion. Les transports en commun sont bondés et nous passons des heures à attendre des bus qui ne viennent pas.
Avec Agathe |
Nous retrouvons Agathe, une amie de l'INSA partie pour une année d'échange à Rio et qui n'a pas trop envie de rentrer ! Elle a pourtant un peu de mal à nous faire partager son amour de la ville... Nous qui étions venues pour visiter, nous n'avons pas choisi le bon moment. Nous voulions monter au Christ à pied mais le copain brésilien d'Agathe nous met en garde : "Si vous montez à pied, après deux heures de marche, vous serez obligées de prendre un bus pour redescendre de l'autre côté pour acheter le ticket d'entrée au point de vue. Afin d'empêcher les gens de monter à pied, ils ne vendent les tickets qu'en bas du côté où c'est interdit de monter à pied". Génial !
Montagnes "deux frères" |
Tous les musées sont fermés et il est difficile de trouver un endroit pour acheter à manger. Même l'eau est payante et affreusement chère. Tout un commerce fonctionne autour de l'eau, vendeurs d'eau fraîche à tous les 10 mètres. Le seul endroit où l'on peut trouver de l'eau gratuite, c'est dans la chasse d'eau des toilettes du carnaval... Mais comment font ceux qui n'ont pas assez d'argent pour se payer une bouteille de 500ml à 5 réals ??
Et de l'autre côté, ce sont souvent les mêmes vendeurs d'eau qui dorment sur la plage faute d'un autre endroit pour dormir...
Plage de Copacabana |
Malgré tout, on ne va pas faire les rabat-joie, Rio reste une ville magnifique construite entre des "morros", montagnes qui peuvent atteindre 800 mètres d'altitude. Belle combinaison entre plage et montagne.
Enfin, à côté de cela, nous décidons d'aller vers le Sambodromo, lieu des fameux défilés du carnaval pour voir si l'on peut trouver une entrée pas trop chère. En effet, nous avions prévu d'acheter les entrées sur internet jusqu'au moment où l'on s'est rendu compte que les prix n'étaient pas en réals mais en dollars américains ! Un vrai business, sur internet, les prix les moins chers sont d'environ 80 dollars et les organisateurs sont des filous : tu cliques pour acheter le billet en serrant les fesses et bim, ils te rajoutent une taxe de 41% pour payer sur internet ! Nous avons abandonné à ce stade là en nous disant que nous chercherions sur place.
Défilé au Sambodromo |
Et nous avons bien fait ! La ville de Rio a mis en place des "billets populaires" pour permettre aux habitants de Rio d'assister aux défilés, mais les habitants sont des filous aussi : ils préfèrent acheter une centaine de places pour les revendre aux touristes !
Toujours est il que nous avons acheté un billet 10 fois moins cher que sur internet !
Le jour J, nous nous présentons au Sambodromo 3h avant que les défilés commencent pour avoir une bonne place (inutile, tout le monde arrive au dernier moment) et là, il commence à pleuvoir des cordes. Peu après nous, arrive une famille de Russes qui a une tête à avoir payé le billet à 150 dollars (ils tirent une de ces tronches que l'on n'a pas trop de doutes !) En 30 minutes, nous sommes trempées jusqu'aux os et il reste 2h30 à attendre. Vu le prix des billets, ils auraient au moins pu couvrir... Pour rassurer nos Russes, certains payent jusqu'à 500 dollars pour avoir une meilleure place ... et se font tout autant tremper !
Mais le défilé vaut la peine, les costumes sont splendides et les chars magnifiques. Chaque école de samba défile l'une après l'autre sur les 750 mètres du Sambodromo. Chaque école dispose d'une heure et demi pour son défilé. Chacune choisit un thème et une chanson que tout le monde répètera en boucle pendant son passage. Ce sont quelques 40 000 personnes qui défileront devant les 72 500 spectateurs jusqu'à 4h du matin. Nous partirons à 1h30 pour aller nous sécher et terminer la nuit dans la gare routière en attendant le bus qui nous ramènera à Belo Horizonte.
Le soir en rentrant, nous repartons en ville pour une projection du cin'énergie. Le public est peu nombreux (tout le monde étant au carnaval) mais très intéressé.
Petit déjeuner avec nos parents de Belo Horizonte |
Nous profitons d'une dernière journée de repos avant de reprendre les vélos direction le Paraguay, si nos parents de Belo Horizonte nous laissent partir !
02/03/15 Des fermes aux immeubles, bienvenue à Sao Paulo ! (10 100 km)
Adieux à nos parents adoptifs |
Nos parents de Belo Horizonte nous laissent partir les larmes aux yeux en nous faisant promettre de donner des nouvelles !
Nous reprenons donc notre route vers l'ouest sur la MG 50 que nous suivrons pendant plus de 400km. De belles averses les premiers jours nous obligent à passer la nuit dans un petit hôtel.
Avec Maria Antonia et José Joaquim |
Le soir suivant, nous demandons à camper dans une ferme. L'accueil est timide mais quand la pluie se met à tomber à verse, les deux papy et mamie finissent par prendre pitié de nous et nous passons la soirée ensemble à l'intérieur. Nous goûtons et regoûtons au célèbre pao de queijo mineiro. Maria Antonia et José Joaquim nous expliquent que tous les fermiers de la région craignent les voleurs à moto. Avec nos vélos chargés, nous sommes donc suspicieuses...
Avec nos amis fromagers |
Cette peur des habitants nous suivra également les prochains soirs et nous devons nous y prendre tôt pour trouver un endroit où camper. Un soir, nous passons même une heure trente avant de trouver une famille sympa dans une fromagerie. Nous rions bien quand ils nous proposent du rock-four !
Mais tout de même, 5 refus d'affilée de fermiers qui nous envoient planter chez le voisin, c'est fatigant... Couplé au mauvais temps, les projections du cin'énergie se font plus rares.
Et puis une fois de plus, Maylis tombe malade : cette fois-ci ce sera 5 jours de fièvre et une angine carabinée. Heureusement que Lucia est là pour assurer, préparer les repas et pousser Maylis à la traine dans les montées...
Sinon, le Brésil reste fidèle à lui même, beaucoup de montées descentes et des conducteurs peu scrupuleux. Le paysage par contre est bien différent du nord de Belo Horizonte : des collines de verts tous différents à perte de vue, le lac artificiel de Furnas et les innombrables cascades. Le tout nous fait un peu penser au pays basque... à la seule exception près qu'au pays basque, les toucans sont rares !
Eh oui, nous en croisons presque tous les jours. Faciles à repérer avec leur vol lourd et leur bec coloré aussi gros que leur corps ! Les toucans vivent généralement en couple mais ne sont pas très photogéniques. Nous essaierons de nous améliorer la prochaine fois pour les photos !
Señor Toucan ! |
Au 5ème jour de fièvre, Maylis capitule et prie Lucia de faire du camion stop. Ce qui n'est pas une mauvaise idée étant donné que nous sommes attendues dans deux jours par notre association à Sao Paulo. Après avoir passé la journée à essayer de faire du stop à l'ombre de la station service, nous abdiquons et nous dirigeons vers la gare routière.
Arrivée nocturne à Riberao Preto 150km plus loin où nous sommes reçues par Tiago, le meilleur ami d'un contact Warm-showers, en voyage à vélo depuis 3 ans. Tiago travaille également sur un projet de cinéma ambulant au Brésil en camion mais galère un peu à trouver des subventions. Merci la France et ses subventions publiques qui croient dans les projets des jeunes !
Riberao Preto |
Suelly la mère de notre ami Warm-showers et sa petite fille |
Nous laissons les vélos quelques jours chez les parents de notre cher Warm-showers et faisons une deuxième tentative de stop jusqu'à Sao Paulo. Les braquages de voiture fréquents rendent les conducteurs un peu méfiants : en 3h de temps, personne ne s'est arrêté et nous terminons une fois de plus dans le bus avec de beaux coups de soleil.
Avec Adriana |
Le premier jour, nous nous baladons dans le centre pour filmer un peu l'ambiance de la ville. Nous sommes impressionnées par la quantité de personnes vivant dans la rue. Comme beaucoup sont droguées, le piéton a parfois du mal à anticiper leurs comportements. Malgré notre attention, Maylis se prend une bonne beigne dans l'oeil alors que Lucia était en train de filmer. Acte gratuit d'une femme de la rue qui passait par là. La police ne bouge pas. Adriana nous expliquera qu'elle a interdiction de toucher aux mendiants. Bon, Lucia, on va ranger la caméra, d'accord ?
Sao Paulo |
Aquecedor solar de baixo costo |
Projection à notre retour chez Tiago |
Et nous voilà rentrées à Riberao Preto. Nous prendrons le temps de monter le court métrage dès notre arrivée à Tucuman. En attendant, il nous reste quelques 900km au Brésil. Croisez les doigts pour nous qu'ils soient plus plats !
canne à sucre |
A notre arrivée dans l'état de Sao Paulo, nous découvrons d'immenses plantations de canne à sucre. Mais quand nous parlons d'immenses, il faut vous imaginer des centaines et des centaines de kilomètres de canne à sucre à perte de vue.
Projection dans la "concha acoustica" |
A 85km de Riberao Preto, nous sommes accueillies dans la famille de Lucas à Bebedouro. Nous avions contacté Lucas par couch surfing quelques jours auparavant. Cinq minutes après notre arrivée, nous sommes déjà invitées à rester le lendemain !
Le soir, nous réalisons une projection sur la place centrale dans ce qu'ils appellent la "concha acoustica", un grand coquillage ayant la propriété d'amplifier naturellement le son. Quelques amis de Lucas sont présents et les passants intrigués s'arrêtent pour pédaler et poser des questions.
Avec Lucas et sa mère |
Le lendemain, la mère de Lucas nous emmène découvrir la ville de Bebedouro qui n'a plus aucun secret pour nous ! Tout d'abord, nous éclaircissons le mystère sur l'origine du nom Bebedouro qui ne vient ni d'un bébé tout dur comme pensait Maylis, ni d'un bébé en or comme avait parié Lucia mais tout simplement du mot "abreuvoir" en portugais ! Lucia lui demande pourquoi est ce que le miel est si cher au Brésil ? La mère de Lucas lui répond : " ici, ils envoient les pesticides par avion, alors ça n'est pas rare que ça déborde et les abeilles meurent"...
Petit passage par la radio locale où un journaliste moyennement inspiré nous pose deux trois questions sans rapport aucun avec le voyage.
Nos amis de l'Educandario devant leur baobab |
Nous rendons ensuite visite à "L'educandario", une école religieuse s'occupant d'enfants ayant des difficultés familiales. Nous réalisons une projection avec un groupe d'une trentaine d'élèves très curieux. Nous leur montrons quelques photos du voyage et devant une photo de baobab au Sénégal, tous s'exclament "nous en avons un dans le jardin" !
Projection à l'université de Bebedouro |
Le soir, nous réalisons une 3ème projection à l'université de Bebedouro . En y allant, nous ne nous attendions pas à être reçues dans un amphithéâtre bondé. Grande ola des 300 étudiants qui nous attendaient ! Un vrai challenge d'animation pour le cin'énergie. Nous projetons notre court métrage et quelques photos et répondons au mille questions des étudiants. Avant de partir, une bonne cinquantaine d'entre eux nous mitraillent de photos avec leurs portables. Nous sortons de la projection à 22h et sommes surprises par le fait que les cours continuent ! On nous explique que beaucoup d'universités au Brésil n'ouvrent que la nuit. Celle ci fonctionne entre 19h et minuit pour permettre aux étudiants de travailler pendant la journée.
Après Bebedouro, nous avions repéré une route secondaire qui paraissait parfaite mais qui s'avère très inégale selon les tronçons : certains sont bourrés de camions sans bande latérale et d'autres bien tranquilles.
Fatima et sa petite fille Wilma |
Quelques kilomètres avant Lins, nous campons dans le jardin de Fatima et sa famille. Le mari de Fatima travaille pour un grand propriétaire de quelques 300 fermes spécialisées dans l'engraissage de boeufs. Après avoir gambadé dans les champs leur vie durant, les petits boeufs entrent dans la ferme où ils sont logés en pension complète : en trois mois les 1500 boeufs de l'établissement passent de 200 à 1200kg ! Fatima nous raconte qu'en sortant, certains ne peuvent même plus marcher. Au menu : farine de maïs, os de boeufs broyés, résidus de canne à sucre, beaucoup de sel et beaucoup d'eau. Avant on leur mettait une boucle d'oreille de la taille d'un ongle et ils grossissaient tout seuls grâce aux hormones qu'elle contenait, maintenant c'est 100% naturel insiste Fatima, à la limite du bio dirait Monsanto ! Une grande partie de la viande part ensuite pour l'exportation en Inde où ils ne mangent pas leurs propres vaches, en Arabie Saoudite, partout partout. De quoi enrichir certains Brésiliens qui deviennent multi millionnaires.
Maison de Fatima |
Fatima nous parle également de son fils camionneur qui bien souvent prend une pastille magique qui lui permet de ne pas dormir pendant 3 jours d'affilée. Un jour, sa fille a sucé le médicament en pensant que c'était un bonbon et elle n'a pas pu fermer l'oeil pendant 2 jours. Si elle l'avait avalé, elle serait sûrement morte nous raconte Fatima, "comme le camionneur que nous avons retrouvé en face, on pensait qu'il dormait mais après deux jours, on a été voir et on s'est rendu compte que son organisme n'avait pas supporté la pastille...". Pas de quoi nous rassurer en tant que cyclistes !
Chouette terrier |
Ibis |
Avec Aucenir et sa copine |
Après 113km de montées et descentes interminables et un ferry pour traverser le fleuve Piracicaba, nous arrivons de nuit chez Aucenir à Tupa. Encore une fois, nous sommes reçues chez l'habitant grâce à couch surfing. Nous restons une journée chez lui et sa copine pour participer à leur pendaison de crémaillère. Aucenir travaille dans une entreprise de photo spécialisée en album photo de fin d'étude. Il nous raconte que la ville de Tupa est la capitale de ce type d'album et qu'il leur arrive de faire 2000km pour aller prendre des photos. Mais le plus impressionnant c'est le prix : jusqu'à 3500 euros ! Et tous les élèves payent, c'est la tradition...
La mère d'Aucenir nous raconte que l'urbanisme du centre ville a été pensé pour représenter le drapeau du Brésil que l'on peut voir depuis google maps. Nous lui demandons si Tupa est une vieille ville ? Elle nous répond "oui, elle a 58 ans !" Pas tout à fait la même conception de ce qu'est une vieille ville mais impressionnant tout de même que 70 000 personnes vivent dans une ville de seulement un demi siècle.
Petite projection avec les amis d'Aucenir dans la soirée.
La tête dans les nuages |
Après une journée sous la pluie, nous arrivons à Rancharia dans la famille de Nathalia, grâce à Couch surfing toujours. Tous sont très curieux et nous leurs montrons quelques photos du voyage.
Dans la famille de Nathalia |
Mort d'un Schwalbe marathon... |
Récolte du soja |
Récolte terminée ! |
Les jours suivants sont plus difficiles : difficiles à cause du trafic intense de camions de soja, routes sans bande latérale qui nous font penser à la BR 116 du nord de Bahia qui nous avait tellement fait peur. Combien de fois sommes nous obligées de nous jeter au dernier moment dans le fossé pour éviter le camion en train de doubler qui nous fonce dessus à 120 à l'heure. Difficultés également pour trouver à dormir dans des propriétés immenses. Nous finissons par nous cacher dans des champs de canne à sucre et de soja pour dormir. En ville, impossible de trouver une famille qui nous accepte dans son jardin. Les gens vont même jusqu'à nous dire "ici, dans ce village, on n'a pas un grand cerveau du coup on est très méfiants, désolés !".
Nous arrivons sur la BR 272, dernière ligne droite avant la frontière, Une fois de plus le trafic de camions est incessant. Nous passons un bouchon de 8km dans un sens et 8km dans l'autre seulement à cause d'un camion bloqué au milieu de la route en raison d'un problème technique. Nous sommes impressionnées par ces Brésiliens capables d'attendre des heures sans broncher alors que nous cyclistes, on nous klaxonne si on fait perdre quelques précieuses secondes aux chauffeurs !
Camping-canne |
Paulo notre ami camionneur |
Après 4 jours sans se laver, la peau cachée par un mille-feuille de crasse, crème solaire et anti moustique, nous capitulons : à quoi bon passer la journée à monter et descendre en râlant et dormir en camping sauvage avec la tête qui explose du bruit des camions qui profitent de la nuit pour rouler plus tranquillement. A Cianorte, nous accélérons donc notre sortie du Brésil en mettant les vélos dans un camion qui nous laisse à 20km de la frontière. Nous passons le fleuve Parana en ferry, et oui, le pont qui traverse le fleuve est tellement grand qu'il est interdit au cyclistes !
Bienvenue au Paraguay ! |