16/03/15 Echy porainte a Paraguay ! (11000km)

canne à sucre
(bienvenue au Paraguay en guarani, langue officielle du pays)

Ça y est, après 2000km de montée et 2000km de descente, nous voilà sorties de ce grand pays qu'est le Brésil ! Mais avant de vous en dire d'avantage, petit retour en arrière à Riberao Preto où nous vous avions laissé la dernière fois.

A notre arrivée dans l'état de Sao Paulo, nous découvrons d'immenses plantations de canne à sucre. Mais quand nous parlons d'immenses, il faut vous imaginer des centaines et des centaines de kilomètres de canne à sucre à perte de vue.



Projection dans la "concha acoustica"
A 85km de Riberao Preto, nous sommes accueillies dans la famille de Lucas à Bebedouro. Nous avions contacté Lucas par couch surfing quelques jours auparavant. Cinq minutes après notre arrivée, nous sommes déjà invitées à rester le lendemain !

Le soir, nous réalisons une projection sur la place centrale dans ce qu'ils appellent la "concha acoustica", un grand coquillage ayant la propriété d'amplifier naturellement le son. Quelques amis de Lucas sont présents et les passants intrigués s'arrêtent pour pédaler et poser des questions.

Avec Lucas et sa mère
Le lendemain, la mère de Lucas nous emmène découvrir la ville de Bebedouro qui n'a plus aucun secret pour nous ! Tout d'abord, nous éclaircissons le mystère sur l'origine du nom Bebedouro qui ne vient ni d'un bébé tout dur comme pensait Maylis, ni d'un bébé en or comme avait parié Lucia mais tout simplement du mot "abreuvoir" en portugais ! Lucia lui demande pourquoi est ce que le miel est si cher au Brésil ? La mère de Lucas lui répond : " ici, ils envoient les pesticides par avion, alors ça n'est pas rare que ça déborde et les abeilles meurent"...

Petit passage par la radio locale où un journaliste moyennement inspiré nous pose deux trois questions sans rapport aucun avec le voyage.

Nos amis de l'Educandario devant leur baobab

Nous rendons ensuite visite à "L'educandario", une école religieuse s'occupant d'enfants ayant des difficultés familiales. Nous réalisons une projection avec un groupe d'une trentaine d'élèves très curieux. Nous leur montrons quelques photos du voyage et devant une photo de baobab au Sénégal, tous s'exclament "nous en avons un dans le jardin" !


Projection à l'université de Bebedouro


Le soir, nous réalisons une 3ème projection à l'université de Bebedouro . En y allant, nous ne nous attendions pas à être reçues dans un amphithéâtre bondé. Grande ola des 300 étudiants qui nous attendaient ! Un vrai challenge d'animation pour le cin'énergie. Nous projetons notre court métrage et quelques photos et répondons au mille questions des étudiants. Avant de partir, une bonne cinquantaine d'entre eux nous mitraillent de photos avec leurs portables. Nous sortons de la projection à 22h et sommes surprises par le fait que les cours continuent ! On nous explique que beaucoup d'universités au Brésil n'ouvrent que la nuit. Celle ci fonctionne entre 19h et minuit pour permettre aux étudiants de travailler pendant la journée.

Après Bebedouro, nous avions repéré une route secondaire qui paraissait parfaite mais qui s'avère très inégale selon les tronçons : certains sont bourrés de camions sans bande latérale et d'autres bien tranquilles.


Fatima et sa petite fille Wilma
Quelques kilomètres avant Lins, nous campons dans le jardin de Fatima et sa famille. Le mari de Fatima travaille pour un grand propriétaire de quelques 300 fermes spécialisées dans l'engraissage de boeufs. Après avoir gambadé dans les champs leur vie durant, les petits boeufs entrent dans la ferme où ils sont logés en pension complète : en trois mois les 1500 boeufs de l'établissement passent de 200 à 1200kg ! Fatima nous raconte qu'en sortant, certains ne peuvent même plus marcher. Au menu : farine de maïs, os de boeufs broyés, résidus de canne à sucre, beaucoup de sel et beaucoup d'eau. Avant on leur mettait une boucle d'oreille de la taille d'un ongle et ils grossissaient tout seuls grâce aux hormones qu'elle contenait, maintenant c'est 100% naturel insiste Fatima, à la limite du bio dirait Monsanto ! Une grande partie de la viande part ensuite pour l'exportation en Inde où ils ne mangent pas leurs propres vaches, en Arabie Saoudite, partout partout. De quoi enrichir certains Brésiliens qui deviennent multi millionnaires.


Maison de Fatima

Fatima nous parle également de son fils camionneur qui bien souvent prend une pastille magique qui lui permet de ne pas dormir pendant 3 jours d'affilée. Un jour, sa fille a sucé le médicament en pensant que c'était un bonbon et elle n'a pas pu fermer l'oeil pendant 2 jours. Si elle l'avait avalé, elle serait sûrement morte nous raconte Fatima, "comme le camionneur que nous avons retrouvé en face, on pensait qu'il dormait mais après deux jours, on a été voir et on s'est rendu compte que son organisme n'avait pas supporté la pastille...". Pas de quoi nous rassurer en tant que cyclistes !



Chouette terrier
Ibis
Avec Aucenir et sa copine
Après 113km de montées et descentes interminables et un ferry pour traverser le fleuve Piracicaba, nous arrivons de nuit chez Aucenir à Tupa. Encore une fois, nous sommes reçues chez l'habitant grâce à couch surfing. Nous restons une journée chez lui et sa copine pour participer à leur pendaison de crémaillère. Aucenir travaille dans une entreprise de photo spécialisée en album photo de fin d'étude. Il nous raconte que la ville de Tupa est la capitale de ce type d'album et qu'il leur arrive de faire 2000km pour aller prendre des photos. Mais le plus impressionnant c'est le prix : jusqu'à 3500 euros ! Et tous les élèves payent, c'est la tradition...


La mère d'Aucenir nous raconte que l'urbanisme du centre ville a été pensé pour représenter le drapeau du Brésil que l'on peut voir depuis google maps. Nous lui demandons si Tupa est une vieille ville ? Elle nous répond "oui, elle a 58 ans !" Pas tout à fait la même conception de ce qu'est une vieille ville mais impressionnant tout de même que 70 000 personnes vivent dans une ville de seulement un demi siècle.

Petite projection avec les amis d'Aucenir dans la soirée.
La tête dans les nuages

Après une journée sous la pluie, nous arrivons à Rancharia dans la famille de Nathalia, grâce à Couch surfing toujours. Tous sont très curieux et nous leurs montrons quelques photos du voyage.

Dans la famille de Nathalia
Mort d'un Schwalbe marathon...

Nous continuons à travers les champs de canne à sucre de l'état de Sao Paulo, Après plus de 10 000km et quelques 300km de projection, le pneu arrière de Lucia nous quitte et nous sommes obligées de faire du stop jusqu'à la ville suivante pour changer de pneu. Dans l'après midi, nous entrons dans l'état du Parana.

Récolte du soja












Récolte terminée !
Les jours suivants sont plus difficiles : difficiles à cause du trafic intense de camions de soja, routes sans bande latérale qui nous font penser à la BR 116 du nord de Bahia qui nous avait tellement fait peur. Combien de fois sommes nous obligées de nous jeter au dernier moment dans le fossé pour éviter le camion en train de doubler qui nous fonce dessus à 120 à l'heure. Difficultés également pour trouver à dormir dans des propriétés immenses. Nous finissons par nous cacher dans des champs de canne à sucre et de soja pour dormir. En ville, impossible de trouver une famille qui nous accepte dans son jardin. Les gens vont même jusqu'à nous dire "ici, dans ce village, on n'a pas un grand cerveau du coup on est très méfiants, désolés !".


Nous arrivons sur la BR 272, dernière ligne droite avant la frontière, Une fois de plus le trafic de camions est incessant. Nous passons un bouchon de 8km dans un sens et 8km dans l'autre seulement à cause d'un camion bloqué au milieu de la route en raison d'un problème technique. Nous sommes impressionnées par ces Brésiliens capables d'attendre des heures sans broncher alors que nous cyclistes, on nous klaxonne si on fait perdre quelques précieuses secondes aux chauffeurs !
Camping-canne
Paulo notre ami camionneur
Après 4 jours sans se laver, la peau cachée par un mille-feuille de crasse, crème solaire et anti moustique, nous capitulons : à quoi bon passer la journée à monter et descendre en râlant et dormir en camping sauvage avec la tête qui explose du bruit des camions qui profitent de la nuit pour rouler plus tranquillement. A Cianorte, nous accélérons donc notre sortie du Brésil en mettant les vélos dans un camion qui nous laisse à 20km de la frontière. Nous passons le fleuve Parana en ferry, et oui, le pont qui traverse le fleuve est tellement grand qu'il est interdit au cyclistes !

Bienvenue au Paraguay !

Premier bivouac au Paraguay
En arrivant au Paraguay, Maylis tente de faire tamponner son passeport pour ne pas qu'on lui fasse de problèmes à la frontière Argentine. Nous allons donc chercher le douanier (le douanier, il faut le chercher littéralement sinon personne ne contrôle rien du tout). Une fois trouvé, ce dernier refuse de tamponner le passeport de Maylis sous prétexte qu'elle n'a pas le tampon de sortie du Brésil... Il va falloir que vous retourniez au Brésil chicas ! Pas aujourd'hui. Nous passons la soirée dans un petit hôtel du côté Paraguay. 100 000 guaranis la nuit, de quoi nous faire ouvrir des yeux ronds. Après conversion, cela revient à 20 euros, tout de même deux fois plus cher que notre standard brésilien.

Salto del Guaira, ce ne sera pas le grand amour. Nous avions vu tant de pub de shopping paraguayens que l'on s'était dit que nous y resterions peut être une journée pour faire des emplettes. En une heure, Lucia fait le tour du centre ville. Elle entre dans un magasin d'appareils photo d'après le panneau mais qui ne vend que des parfums toc à l'intérieur.

Pour faire les choses bien, Maylis décide de retourner à la frontière du Brésil pour faire tamponner son passeport. Après 10km de centres commerciaux nous arrivons à la frontière où personne n'est habilité à apposer le dit tampon. "Il  faut retourner à la ville de Guaira du côté brésilien". Merci mais on ne peut pas passer le pont à vélo ! Maylis retourne donc au Brésil en stop direction la police fédérale. En arrivant à 11h45 elle trouve tout fermé, il faut retourner à 14h30 ! Maylis part rejoindre Lucia qui l'attend à la frontière de l'autre côté du pont. Les policiers n'en reviennent pas que ce soit si compliqué. A 14h30, Maylis traverse pour la 3ème fois le pont et revient avec le tampon salvateur ! Nous repensons à notre ami Idrissou rencontré au Sénégal en nous disant que lui aussi aurait pu arriver jusque là sans que personne ne le contrôle une seule fois !

Tampon du côté Paraguay. Nous repartons alors que le Brésil se prépare à une grève générale contre la présidente Dilma élue il y a à peine 5 mois. Difficile de prendre part à ce débat mais de ce que nous avons pu discuter avec les gens, le monopole de l'information par la chaine de télévision Globo n'aide pas les Brésiliens à cultiver leur esprit critique...

Dans la famille de Marcial et Lila
Au Paraguay, nous sommes ravies de pouvoir parler espagnol et de pédaler sur des routes beaucoup plus tranquilles : beaucoup moins de camions et une bande latérale très large. Si les montées et descentes continuent, la route est tout de même plus plate. Lucia retrouve également le sourire devant les étalages immenses de maté, mais ici, ils le boivent froid, c'est le térêré.

Le Paraguay semble être également un pays très agricole : soja, maïs, canne à sucre, etc. Toutes les cultures sont destinées à l'exportation, tant et si bien que le Paraguay ne produit plus de fruits et légumes pour sa propre consommation ! Tout est importé d'Argentine ou du Brésil et la pomme se vend à l'unité nous racontent Marcial et Lila chez qui nous dormons le deuxième soir.


Et nous voilà à 1400 km de Tucuman et à 350 km de la frontière Argentine, ça sent la fin !